Départ de la Rue Pierre Leroux. Côte de la Cantera Au coin du café "La Butte" |
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![]() Au mur, à gauche, affiches des cinémas La perle et Rialto |
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A
l'extrémité de Bab-el-Oued, il faut gravir une rude montée,
pour accéder à la place Dutertre.
C'est la rue Pierre Leroux et pour que nul n'en ignore, on lit sur la
petite plaque bleue où figure son nom: Pierre Leroux, publiciste,
1797-1871.
Mais les habitants du quartier n'en ont cure. Ils sont presque tous d'origine
espagnole et un nom comme celui de Cervantes les aurait peut-être
intéressés d'avantage, quoi qu'on ait guère le loisir,
lorsqu'on aborde une telle montée, de prendre garde au nom du monsieur
qui a doté la rue de son nom.
-Poh... poh... poh... si ça grimpe ici ! gémissent les braves
gens qui escaladent la rue Pierre Leroux.
Et les chauffeurs de taxi se font beaucoup de mauvais sang pour leur voiture
lorsqu'ils ont à emmener quelque client dans ces parages.
Il
y a quelques années, quand il m'arrivait d'avoir besoin d'illustrer
un article où il était question de gosses* de ce pays, j'allais
le plus souvent, choisir mes modèles* dans le terrain vague qui
bordait tout un côté de la rue Pierre Leroux.
Sur cet immense terrain en pente, la marmaille des environs, divisée
en deux camps, se livrait, à l'aide de projectiles variés,
de véritable bataille rangées.
C'était l'époque des "Westerns" et l'imagination
aidant, chaque gosse se voyait transformé en cow-boy ou en peau-rouge
- ceux-la reconnaissables à leur couronne de feuillage piquée
d'une plume de coq.
De tous les côtés claquaient des détonations d'imaginaires
pistolets.
- Pan... pan... tu es mort !
- C'est pas vrai... moi je t'ai attrapé au lasso.
Et selon l'humeur de chacun, ces explications dégénèrent
bien souvent en véritables combats de boxe avec galerie de supporters,
qui n'avaient plus rien à voir avec le cinéma.
Depuis un an, les cris joyeux se sont tus, remplacés par les bruits
d'un grand chantier.
Et maintenant sur le terrain vague de naguère, s'élève
un immense édifice aux lignes modernes.
C'est le centre social Jean-Louis Villeneuve, ainsi nommé en souvenir
de l'ancien conseiller général de Bab-el-Oued.
Il abrite un bureau annexe de la mairie où l'on est fort civilement
accueilli et qui renseigne utilement sur les démarches à
accomplir pour les actes de la vie civile.
Un bureau annexe du Gouvernement général, qui groupe les
services techniques de la direction du Travail, ainsi que le bureau de
la conseillère du Travail.
Le centre social renferme également une école d'apprentissage
de coupe et de couture, une installation de bains-douches et une garderie
d'enfants qui constitue un modèle du genre.
J'ai pu y jeter un rapide coup d'oeil. Tout y a été conçu
à la mesure des enfants : petites tables du réfectoire,
petits lits de repos, petits fauteuils, petits lavabos et... petites cuvettes
de water. Car, les blocs hygiéniques y ont été aménagés,
toutes proportions gardées, comme ceux des grandes personnes. Cependant
quelques frises amusantes, en couleurs fraîches, auraient pu être
prévues pour égayer cet ensemble.
Au service et pour le bien de tous , telle pourrait être la devise
de cette oeuvre sociale si magnifiquement réussie et qui répond,
par ses multiples destinations, à de nombreux besoins de la population
de ce quartier sympathique.
Charles Brouty. "Alger d'hier, Alger d'aujourd'hui. La rue Pierre Leroux." Article de l'Echo d'Alger. 22/9/54.
*Note de l'auteur : Se faire traiter de "Poulbot" fut longtemps pris par les enfants pour une injure infamante.
Des
fois aussi y s'asseyaient trois ou quatre dehors le café, juste
sur letrottoir à l'entrée; y prenaient une chaise, ils
la mettaient à l'envers et y mettaient les bras sur le dossier,
en discutant le coup. Et chaque fois qu'une fille elle passait, chacun
il lui chantait sa chanson:
Aie,comme
tu es belle, Marinette, aujourd'hui!
Mais
Loretta Young c'est un épouvantail à côté
de vous, Mademoiselle !
Chez
qui vous avez acheté ces yeux, chez qui?
Et les filles plus
jolies les unes que les autres, avec des robes à fleurs de toutes
les couleurs, bleues, roses, vertes, jaunes, blanches, décolletées,
avec les bras nus bronzés qu'on aurait mordu dedans, avec des
cheveux longs, elles passaient, et elles repassaient encore, comme si
elles voulaient faire mourir les garçons à petit feu.
Robert
CASTEL. Inoubliable Algérie. Pierre Horay. 1965..
La
côte de la Basetta - Rue Pierre-Leroux
La
côte de la Basetta
(en haut on distingue le Lavoir "El Baset"
à droite le centre Jean-Louis Villeneuv
avec l'entrée de la crêche - garderie
et au dessus l'entrée des douches municipales